Raphaël Pomey
Raphaël Pomey

18 juin 2022 3 minutes de lecture

#2 J'irai marcher sous vos vulves

Ou comment le niveau zéro est devenu autoritaire.

Inutiles pour développer votre business ou vous ouvrir les chakras: mes publications sont un défouloir personnel où il est interdit de montrer de la « bienveillance » et de « croquer la vie à pleines dents ». Rédacteur en chef du journal « Le Peuple » et philosophe de formation, j’y dégonfle des baudruches et vous oriente vers les auteurs que j’aime.

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En 321 avant Jésus-Christ, les Romains s’étaient mangé une secouée mémorable face aux Samnites, des gens rugueux qui vivaient dans les montagnes en Italie centrale. S’étant rendus, ils avaient dû passer sous le joug de leurs adversaires, ainsi réduits à l’état de bétail. Précisons d’emblée que nos ancêtres, qui n’étaient pas animalistes, n’appréciaient guère ce genre de mises en scène. Cet épisode honteux a donné, en français, l’expression « passer sous les Fourches Caudines », du nom du lieu de ladite branlée.

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Aujourd’hui, on ne passe plus sous les Fourches Caudines, mais sous des vulves géantes.

Dans l’édition du Peuple que nous sortons la semaine prochaine, il sera question de ma visite au festival « Viva La Vulva » (dès trois ans), qui se tenait aux Bains des Pâquis, à Genève, il y a quelques jours. Je ne vais pas vous en donner tous les éléments ici - mon but est quand même de vous faire acheter des abonnements, hein, mais je trouve symboliquement important que tous le monde ait dû passer sous une représentation démesurée de sexe féminin pour accéder à la plage artificielle la plus branchouille de la Cité de Calvin.

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Genève est la « ville basse du monde », juge Bloy, mais moi j’aime bien le chef-lieu de la République. Ses restaurants libanais solides, son capitalisme décomplexé, ses lobbies... Si bien que je dois admettre que ça me continue de me faire un peu bizarre de voir son symbole international - le jet d’eau - derrière des vulves géantes et moches (« préhistoriques », selon l’organisation) disposées un peu partout. Et puis vous voyez, je ne suis pas absolument certain qu’il serait idéal de faire défiler mes gamins devant des pénis de 33 mètres. Et comme je suis assez honteusement pour l’égalité des sexes, j’incline à privilégier la même grille de lecture avec l’intimité féminine. Sans doute d’ailleurs que la triste égalité de dinosaure que je prône ne pèse plus bien lourd devant le « féminin sacré », auquel on pouvait s’initier « en toute sororité » (donc sans les beaufs comme moi) à Viva la Vulva.

Avec vos impôts!

Ce qui me gêne, fondamentalement, n’est pas la régression. Que des gens décident de faire du « crochet-tricot autour de la vulve » (atelier no 6) ou du « pédalo vulvo-romantique » (atelier no 15), en fait je m’en fous glorieusement. Ce qui me gêne, c’est que le délitement du sens commun se fasse avec les impôts de la population, dans des festivals et des espaces de parole lourdement subventionnés. Que le bon contribuable ne puisse pas s’y opposer révèle une autre dimension de l’avènement de l’« Empire du Bien », dont parlait Philippe Muray : son autoritarisme chatouilleux. Un autoritarisme qui s’alimente à l’indignation constante du style : « De penser qu’encore en 2022 il y ait des gens.... » et là il s’agit d’insérer un truc du style : « qui ne sont pas végétariens », « qui font des enfants », « qui ne se félicitent pas que des enfants de trois ans fassent du château gonflable sous un clitoris géant)... ».

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J’ai grandi, comme à peu près toute la classe moyenne de ma génération, en écoutant du punk à roulettes, et assez peu de cantiques. Je détestais l’autorité, et je crois que je la déteste toujours. Qu’elle soit désormais thérapeutique, maternante, ludique et régressive n’y changera rien.

Que Dieu nous garde,
Raphaël Pomey


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Raphaël Pomey
Lancé il y a 1 an

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